Dans une petite ville blottie sous un manteau de neige, vivait un homme nommé Denis, que tout le monde, enfants comme adultes, appelait affectueusement « Nini » ou parfois « la Malice ». Nini travaillait toute la journée dans une petite librairie de quartier, aidant les clients à trouver le livre parfait, guidant les enfants vers des histoires magiques et prêtant l’oreille aux récits des passants. Bien que son métier ne soit pas de tout repos, il restait toujours joyeux, le cœur débordant d’énergie et de rêves.

Mais ce que peu de gens savaient, c’est qu’après ses longues journées à la librairie, Nini consacrait tout son temps libre à répandre la magie autour de lui. Le soir, au lieu de rentrer directement chez lui, il prenait le chemin du foyer des aînés, là où les résidents l’attendaient avec impatience. Il leur lisait des contes de Noël, des légendes oubliées, et inventait même des histoires rien que pour eux. Son rire et sa malice étaient comme une bouffée de jeunesse pour ces personnes âgées, qui voyaient en lui un véritable rayon de soleil.

Chaque week-end, il s’installait sur la place du marché, une table remplie de fournitures de bricolage, de recettes simples et de petits contes imprimés. Avec patience, il montrait aux enfants comment fabriquer des décorations pour Noël, des couronnes de papier et même de petits bonshommes de neige en laine. Les parents, émus, le regardaient transformer chaque petit atelier en un moment inoubliable.

Il n’attendait rien en retour. Pour lui, chaque sourire et chaque « merci, Nini ! » valaient bien plus que l’or du monde. Mais, peu à peu, les gens commencèrent à en demander davantage. Des familles lui réclamaient de nouveaux ateliers, des enfants voulaient des histoires chaque jour, et même les commerçants du marché lui suggéraient d’organiser des soirées contées pour attirer plus de visiteurs. Nini, toujours de bonne volonté, se disait qu’il pourrait bien faire un effort de plus.

Alors, malgré la fatigue de son travail en librairie, il se mit à écrire de plus en plus, investissant toutes ses économies pour imprimer des contes, acheter des matériaux pour ses bricolages, et même confectionner de petites cartes de vœux qu’il distribuait gratuitement aux passants. Nini rêvait en secret de pouvoir, un jour, faire de cette passion son métier, d’écrire et de lire des histoires chaque jour pour tous ceux qui voulaient rêver.

Mais quand ses économies s’épuisèrent, il dut se résoudre à demander de l’aide. Il organisa une soirée de contes en espérant vendre quelques-uns de ses livres, fit des affiches pour inviter les gens à acheter un petit recueil, mais personne ne vint. Les enfants ne comprenaient pas pourquoi ils devaient payer pour ses histoires, et les adultes se disaient qu’ils pouvaient toujours attendre la prochaine lecture gratuite.

Bientôt, les dettes s’accumulèrent, et Nini perdit tout ce qu’il avait investi dans cette belle idée. Un soir, alors que Noël approchait et que la neige tombait doucement autour de lui, Nini rentra chez lui le cœur lourd. Sa petite maison, qui autrefois brillait de mille lumières pendant les fêtes, semblait triste et sombre. Pour la première fois, Nini, l’homme qui avait fait rire et rêver tant de gens, se demanda si tout cela en valait vraiment la peine.

Le lendemain matin, pourtant, il reprit le chemin du foyer. La malice avait quitté son sourire, et sa voix tremblait légèrement lorsqu’il commença son histoire, mais il était là, fidèle. Après le conte, une dame du foyer, que l’on appelait Mémé Clémence, s’approcha de lui et posa une main tendre sur son épaule.

« Nini, lui dit-elle d’une voix douce, tu n’imagines pas tout ce que tu apportes ici. Ta générosité est le plus beau des cadeaux, et Noël ne serait pas pareil sans toi. »

Ces simples mots ramenèrent une chaleur douce dans le cœur de Nini. Il se rappela alors pourquoi il faisait tout cela. Ce n’était ni pour l’argent, ni pour la gloire, mais pour voir des regards remplis de bonheur et pour entendre ces petits remerciements qui, seuls, suffisaient à lui redonner le courage de continuer.

Cette nuit-là, il retrouva, en rentrant chez lui, une enveloppe glissée sous sa porte. Elle contenait une petite note et quelques billets froissés.

> « Cher Nini, tu as apporté tant de joie dans nos vies. Tes histoires m’ont réconforté et m’ont fait rêver. Je sais que tu n’attends rien, mais accepte ce petit cadeau en guise de remerciement. Continue d’être toi, notre Nini, la Malice de notre village. »

Ces mots touchèrent profondément Nini, et il sentit, pour la première fois depuis longtemps, que tout ce qu’il avait fait n’avait pas été vain. Les jours suivants, d’autres lettres arrivèrent, de petits mots d’encouragement et de gratitude.

À la veille de Noël, il décida d’organiser une dernière lecture sous le grand sapin du village. Le soir venu, alors que les cloches sonnaient et que les flocons s’envolaient dans la lumière des lampadaires, Nini raconta son plus beau conte de Noël. Les enfants, les familles et les anciens étaient là, silencieux, écoutant chaque mot avec une tendresse sincère. Et pour la première fois, ils comprirent vraiment la valeur de ce que Nini leur avait offert chaque jour.

Ce soir-là, après le dernier mot de son conte, les villageois se rassemblèrent autour de lui, lui offrant chacun un petit quelque chose : une bougie, un biscuit, une guirlande qu’ils avaient fabriquée eux-mêmes. Ils lui firent la promesse de toujours honorer sa générosité et de la transmettre autour d’eux.

Et tandis que Nini rentrait chez lui, un sourire revenu sur son visage, il sentit que Noël lui avait offert le plus beau des cadeaux : l’amour et la reconnaissance de ceux qu’il avait tant aimés.

Depuis ce jour, chaque Noël, les habitants de la petite ville se rassemblent pour honorer la magie de Nini, la Malice, celui qui avait su, par sa bonté, transformer chaque instant en un moment de fête et d’amour.